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Dossier spécial : les moulins de ma Médopole

Après l’article sur les moulins de mon Médoc, un coup d‘œil sur ceux de notre Médopole*.


Chaque commune est abordée mais quelques libertés ont été prises sur les frontières médopolitaines pour le paragraphe traitant des moulins de la Jalle qui l’enjambent depuis Saint Médard-en-Jalles jusqu’à Blanquefort en traversant Le Haillan, Le Taillan et Eysines.


ARSAC

Au XIXe siècle, sur le ruisseau le Moulinat, on dénombrait quatre moulins à eau : le Moulin de la Mouline, près de la route qui mène à Ligondras, ceux de Séquis et du Tertre à proximité du Château du Tertre et celui de Bory près de Ligondras. Ce dernier était situé à quelques encablures (une encablure est environ égale à 200 m) du seul moulin à vent, celui d’Angludet.


BLANQUEFORT

Trois (voire quatre) moulins à eau et deux à vent ont fourni la farine aux Blanquefortais mais aussi aux Bordelais. Nous allons tout d’abord considérer les moulins à vent de la commune, notamment par leur localisation, aux portes de Parempuyre, à Grattequina.


En consultant une carte du XIXe siècle, on peut voir une île au large de Florimond. Sur celle-ci, appelée Ile de Blanquefort, connue aussi sous l’appellation d’île de Duras (du nom de son propriétaire, le duc Durfort de Duras), ou encore de Gratte qui n’a existaient deux moulins à vent : le Moulin de Grattequina et le Moulin de Pontac, dont la situation sur le fleuve facilitait l’approvisionnement en céréales et la livraison de la farine produite.

Après décision des services maritimes vers1860, un barrage et deux digues vont rattacher l’île de Grattequina (de gratte qui en a, surnom d’une mauvaise terre argileuse qu’il fallait beaucoup gratter pour cultiver) à la côte en 1865.

Le Moulin de Grattequina aurait été converti en maison d’habitation du propriétaire du château de Grattequina, quant à celui de Pontac, il est devenu, après avoir été surélevé, tour d’observation, toujours présente aujourd’hui, à proximité du château-hôtel.


Le Pian Médoc

LE PIAN-MEDOC

Il existe un moulin à eau sur la commune, encore visible de nos jours à proximité du Pont de Bouchaud près de l’église Saint Seurin. Le Moulin de Boucheau (Bouchaud, Bouchey ou Bouchy), qui enjambe le bief rejoignant la jalle de Ludon, a été restauré, les vannes et les écluses remises en état. On retrouve une trace écrite de son existence en 1421 où il est confié aux Pianais afin de leur fournir la farine nécessaire à la confection de leur pain. Sur certaines cartes anciennes, il porte le nom de ses propriétaires d’alors, devenant ainsi Moulin de Létu.


Il y aurait eu un second moulin à eau, le Moulin de Janet, à Sénéjac, difficile à localiser de nos jours, pour lequel on a retrouvé traces écrites en 1847 puis en 1850 pour signaler son arrêt à cause d’un niveau d’eau insuffisant et sa destruction prochaine.


Un moulin à vent, qui daterait du début du XVIIIe siècle et dont il ne subsiste, comme souvent, qu’une tour envahie de lierre s’élève sur le bord de la route menant à Arsac, à la limite des deux communes. Ce Moulin de Soubeyran, qui a sûrement servi de meunerie, a la particularité d’avoir plusieurs ouvertures côté route et un tuyau de poêle à l’extérieur qui indiquent qu’il a probablement servi, plus tard, d’habitation.


LUDON-MEDOC

Deux rues de la commune rappellent l’existence de moulins.

Tout d’abord dans le quartier Canteloup, celle du Moulin du Poulet est proche d’un moulin à eau éponyme, existant depuis le XIVe siècle sur la dérivation du ruisseau de Lartigue. Il a la particularité d’être depuis 400 ans la propriété de la même famille qui l’a aménagé en habitation (avec l’eau qui coule sous la maison) et en a gardé une énorme meule qui a cessé sa fonction en 1960 après avoir notamment fourni la farine aux Ludonnais lors de la Seconde Guerre Mondiale.


 

 

L’autre à proximité du Château La Lagune, celle du Moulin à Vent mène au Moulin du Puy (ainsi nommé sur la carte IGN 2003), que l’on trouve sous les appellations de Ludon sur les cartes du XVIIIe siècle de Cassini et Belleyme, de la Lande en 1843, d’Ancien Moulin sur la carte IGN de 1944, voire de la Lagune, du nom du second vin du Château pour lequel il sert d’illustration sur les étiquettes.


Ludon

MACAU

Les Médopolitains connaissent tous le lieu-dit Les Trois Moulins ; cela peut laisser penser que Macau comptait trois moulins. Ne nous fions pas aux apparences, au XVIIIe siècle, la commune comptait sept moulins à vent. Aujourd’hui, celui de Canteloup situé près du carrefour de la route de Louens et du chemin de Canteloup, amputé de ses ailes, a été restauré par ses propriétaires.


Macau

PAREMPUYRE

En 1848, les céréales produites sur la commune et consommées par ses habitants étaient alors le froment et le seigle. La commune aurait été riche de quatre moulins : deux à vent et deux à eau, mais les traces écrites pour certains d’entre eux sont rares ou inexistantes d’où l’emploi du conditionnel.


L’allée du Moulin de Landegrand mène tout droit à l’ancien moulin à vent qui daterait du XVIIIe siècle (la date de 1785 figurant sur une pierre près du balcon). Aujourd’hui, tapissé de plantes grimpantes et "défendu" par un parterre de ronces, il aurait fonctionné jusqu’au XIXe siècle puis remis en fonction lors de la Première Guerre Mondiale avant de perdre ses ailes au début du XXe et d’être transformé pour servir d’habitation (nouvelles ouvertures et pose d’un balcon). A l’intérieur figurerait une inscription en patois, qui a été traduite : "Vous êtes au Moulin de Lande-Grand, frère du Moulin d’Escoute Plouyé, qui moud de la farine de pain blanc pour manger avec des cagouilles (escargots)" ; Il est à noter que le Moulin d’Escoute Plouyé peut se traduire par Moulin de l’Ecoute–s’il-Pleut qui désigne pourtant généralement un moulin à eau ! Il est peut-être qualifié de monument historique, mais s’agissant d’une propriété privée, on ne retrouve pas d’éléments précis.


Parempuyre

Il y aurait eu un deuxième moulin à vent appelé Moulin du Port ou du Bourg de Parempuyre au lieu-dit Le Port. Présent sur les cartes de Cassini (vers 1750) et de Guyenne de Belleyme (1785, plus récente et précise que celle de Cassini), il est fait état du nom de son meunier Pierre Fort, en 1848, mais dès la seconde moitié du XIXe siècle, il n’est plus mentionné sur les cartes. Aujourd’hui il serait exactement implanté au bout de l’impasse Marcel Guilbert.


Pour les moulins à eau, peu de renseignements, l’un d’eux est-il le frère du Moulin de Landegrand, signalé dans l’inscription ?


Le Moulin de Cazeau, près de la rue des Palus vers le Port de Lagrange, aurait été un moulin à eau sur la jalle de la Violette avec du blé cultivé à proximité, mais à confirmer car pas de trace écrite.


Un lieu-dit, la Moulinière, pourrait laisser supposer l’existence d’un autre moulin à eau alimenté par la jalle du Flamand à proximité de la Garonne.


Concernant les moulins à eau, tous sont sur la Jalle de Blanquefort, quelquefois désignée sous l’appellation simple de "la Jalle" ; Celle-ci est généralement considérée comme la limite Sud du Médoc.

Nous allons franchir les limites de la Médopole pour évoquer les moulins qui enjambent cette Jalle, qui sort de terre à Saint-Médard en Jalles, est grossie par quelques crastes (fossés de drainage), petits ruisseaux et petites jalles avant de se jeter dans la Garonne, après le Pont des Religieuses à

Blanquefort, (non loin de Grattequina vers Bordeaux), après avoir cheminé sur plusieurs dizaines de kilomètres.

Au XIXe siècle, ces moulins étaient les plus "réputés de la région" parce qu’ils étaient les plus utilisés pour moudre les grains et approvisionner Bordeaux en farine.


Saint Médard en Jalles

Moulin de Bonneau : c’est le plus près de la source et le plus petit ; Il a disparu au milieu du XIXe siècle et ne subsistent de nos jours que les ruines du pont et d’une partie du déversoir.


Moulin de Caupian : reconstruit au XIXe siècle avec trois corps de bâtiment, il est devenu, de nos jours, propriété privée. On y a moulu le grain mais aussi fabriqué du suif pour l’éclairage à la chandelle et même élevé des sangsues pour la médecine.


Moulins de la Poudrerie : au pluriel parce qu’ils étaient six, totalement différents des autres, en ne servant pas pour le grain, mais pour la poudre. Jehan Dupérier, un négociant bordelais, fait construire six moulins (les Moulins à poudre du Roy) dans lesquels il fait fabriquer de la poudre noire, mélange de salpêtre, soufre et charbon de bois, pour la chasse et accessoirement pour les munitions de l’armée royale. Lorsqu’il meurt dans l’explosion des moulins, Louis XIV ordonne la reconstruction du site qui devient, la poudrerie Royale. Evoluant constamment, elle joue, encore de nos jours, un rôle majeur lors des différents conflits. Aujourd’hui, les rares vestiges des moulins à battants (à roues verticales) sont les emplacements taillés dans la pierre pour le passage des roues à aubes.


Moulin de Gajac : il date du XIIIe siècle avec trois paires de meules avec rouets. Propriété de la même famille depuis 1750, il a été rehaussé d’un étage au XIXe siècle. Il a fabriqué de la farine jusqu’en 1935, quand les Grands moulins de Paris se sont installés à Bordeaux ; ses propriétaires ont alors fait installer une turbine pour produire, jusque dans les années 1970 des pains... de glace (!). Il est visible depuis la route à l’entrée de Gajac.


Moulin(s) du Thil : au XVIIIe siècle, il y aurait eu deux moulins dont l’un possédant 4 meules. Dans les années 1920, la ville de Bordeaux s’approprie les environs du moulin pour capter les sources et créer l’usine de Thil-Gamarde, de potabilisation de l’eau stockée avant d’être distribuée sur la métropole bordelaise. Situé dans le domaine du Thil, récemment racheté par Bordeaux Métropole pour en faire un parc public, il ne subsiste, de nos jours, que les soubassements d’un des moulins.


Le Haillan

Moulin Le Moulinat : l’un des plus fameux moulins de la Jalle, ses 2 meules lui permettaient d’alimenter Bordeaux en farine. La maison du meunier construite en 1939, est devenue en 1995, le siège de l’association Cistude Nature qui propose des actions d’éducation et de sensibilisation à l’environnement pour les établissements scolaires. L’association organise toute l’année des sorties thématiques gratuites et des sorties grand public pour découvrir l’environnement à travers des approches différentes.


Moulin de Jallepont : dénommé à la fin du XIVe siècle Moulin de Mauguer (et parfois localisé sur la commune d’Eysines, par son emplacement à la limite des deux communes), ce moulin à papier a été démoli en 1940, ne laissant apparaître aujourd’hui que le barrage. Des chiffonniers s’étaient installés, à proximité, de chaque côté de la rue pour y stocker les chiffons qui alimentaient le moulin.


Le Taillan Médoc

La commune aurait la rare particularité de n’avoir jamais eu de moulin à vent.


Moulin de Bussaguet : il est déjà identifié en 1242 sous le nom "le molendini de Bussaguet" appartenant au chevalier Guillaume de Bussac, de qui il tiendrait le nom. Au XVIe siècle, la Seigneurie de Bussaguet était propriétaire d’un domaine s’étendant sur les communes du Taillan, Saint Médard, Eysines, Blanquefort et Parempuyre. Situé dans le domaine dit "des Sources", il est acheté, en 1844, par la ville de Bordeaux lors de la construction de l’aqueduc du Thil (du Taillan) qui alimente Bordeaux en eau potable.


Eysines

Un moulin à vent aurait fait son office durant la deuxième partie du XVIIIe siècle non loin de l’ancienne église romane, avant d’être détruit. Son emplacement n’est pas officiellement défini, peut-être l’actuelle allée du Moulin à vent y menait-elle ?


Moulin des Landes ou Landemoulin ou Moulin Blanc : construit par les Templiers au XIIe siècle, il était spécialisé dans la mouture du blé (grain blanc, d’où son surnom). Son écluse permettait de fournir l’eau nécessaire aux cultures maraîchères d’Eysines et du Taillan. Un restaurant, "Le Goujon Vivant" s’installa dans la maison du meunier au début du XXe siècle et fut fréquenté par des célébrités (Marcel Cerdan et son fils Marcel Junior notamment). Aujourd’hui, c’est le restaurant "Bistrot de la Jalle" qui occupe l’un des bâtiments de l’ancien moulin.


Eysines

Moulin de Plassan dit "Moulin Noir" : construit au XIIIe siècle, il était spécialisé dans la mouture du seigle (grain noir, d’où son surnom). Important moulin à quatre corps de bâtiment dont deux en bois, aujourd’hui en triste état. Au XIXe siècle, il appartenait à la famille Plassan. Situé à la limite des communes du Taillan, d’Eysines et de Blanquefort, il est parfois désigné comme faisant partie de Blanquefort.


A la fin du XIXe siècle, les minoteries industrielles s’implantent à Bordeaux, les moulins à eau d’Eysines, notamment, cessent leurs activités.


Blanquefort côté Jalle

Moulin de Majolan ou de Majoulan ou de Gua : il faisait partie du domaine du Luc, sur lequel était aussi érigé un château fort. A la fin du XVIIIe siècle, la famille Dulamon fit l’acquisition de tout le domaine y laissant son nom, faisant détruire le château et construire un nouveau, aujourd’hui propriété des Orphelins Apprentis d’Auteuil. Le moulin était encore en activité fin XIXe siècle et debout jusqu’en fin des années 1970, début des années 1980, quand ses propriétaires d’alors le font démolir. Ne restent guère aujourd’hui qu’un petit pont sur la jalle et quelques pierres de l’autre côté de l’entrée principale du parc de Majolan.


Moulin de Goy ou de Gua ou de Goua : il pourrait être situé de l’autre côté du parc de Majolan pour certains, alors que d’autres prétendent que le moulin de Majolan et lui ne font qu’un. Le fait qu’il n’y ait, de nos jours, aucune trace de ce moulin explique sûrement ce désaccord.


Moulin de Canteret ou de Cavaret : point de mystère pour ce moulin à aubes qui est le plus ancien de tous et le plus actif et qui existe encore ou plutôt survit encore. Même s’il a cessé son activité, le domaine, dont il fait partie, a été acheté en 1962 par M. Maudouit pour y construire une usine de fabrication de chaussures pour enfants, Mod8. Celle-ci ferme en novembre 2013, reprise par d’anciens employés qui ouvrent dans ses murs, l’Atelier du chalet aquitain ; en 2023, des problèmes financiers et une absence de repreneur marquent l’arrêt définitif de l’entreprise. Aujourd’hui, alors qu’il côtoie une grande quantité de gravats, son avenir est menacé par la zone résidentielle qui doit être créée, y survivra-t-il ?


Moulin de Grangeot : on pourrait le qualifier de moulin éphémère tant sa durée d’existence fut courte (moins d’un demi-siècle). L'année 1721 marque l'autorisation de creuser un canal pour édifier le moulin ; en 1760 après de multiples querelles, la décision est prise de démolir le moulin pour rendre la Jalle navigable de Blanquefort à la Garonne et de construire à son emplacement un pont.

Aujourd’hui cette zone de la Jalle fait partie du Parc des Jalles, espace naturel de 6000 hectares à vocation écologique, agricole et paysagère, créé en septembre 2021 et qui s’étend sur neuf communes (Blanquefort, Bordeaux, Bruges, Eysines, Le Haillan, Le Taillan-Médoc, Martignas-sur-Jalle, Parempuyre et Saint-Médard-en-Jalles). De belles balades vous sont proposées par les municipalités concernées.


Sources pour cet article

- Parempuyre… sa Mémoire (de l’association la Mémoire de Parempuyre)

- Communauté de communes Médoc Estuaire

- Porte du Médoc (site d’information du Cercle Historique Blanquefortais)

- Quand le Médoc avait des ailes, de Nathaniel Lee

- Le Pian-Médoc raconté à ses habitants... (Atelier Histoire du Pian)

- Patrimoine de St Médard en Jalles (de l’association du patrimoine de Saint-Médard-en-Jalles)

- Le Marais de Blanquefort et les terres environnantes (étude d’André Guillocheau)


 

Par Dominique Gravois

Photos (c)DG/LGM 2024



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